Salaires

Les comparatifs de salaires entre hommes et femmes font, globalement, ressortir un avantage en faveur des hommes. Il faut toutefois noter de sensibles contradictions entre ces comparatifs, autant quantitatives que qualitatives, et surtout, il convient de s'interroger sur les méthodes utilisées. Elles ignorent tout ou partie des points suivants :

  • le temps partiel est beaucoup plus pratiqué par les femmes, d'où un revenu féminin global moindre ; à cet égard, il conviendrait de baser les comparatifs sur les salaires horaires, et non mensuels ; le graphique INSEE [1] ci-dessous montre que, tous secteurs confondus, les hommes occupent 57% des emplois ;
  Taux de féminisation par secteur d'activité
  • les hommes sont répartis sur beaucoup plus de corps de métiers que les femmes, ou, inversement, de nombreuses catégories sont à forte dominante masculine (en 2013, 92% des ouvriers sont des hommes) ; le graphique ci-dessus montre que 11 secteurs d'activité sur 17 (soit 65%) sont majoritairement masculins (hommes présents à plus de 50%) ; il montre aussi que, dans le secteur le plus féminisé (éducation, santé, action sociale), les hommes représentent 24%, alors que dans le secteur le plus masculinisé (construction), les femmes ne représentent que 7% ;
  • la population active est particulièrement contrastée entre les sexes : en 2011, 61,8% des hommes y sont présents, contre 51,7% pour les femmes [2]. Cet écart de 19,5% entre les représentativités des deux sexes, pourtant notable, n'est pas intégré dans les habituels comparatifs de salaires hommes-femmes. En ce troisième millénaire déjà bien entamé, peu de personnes s'interrogent sur cette disparité, tant on considère encore normal que l'homme soit un pourvoyeur ;
  • l'INSEE le confirme : les écarts de salaires dépendent en fait plus des catégories socioprofessionnelles que du sexe [3] ; il est même certaines catégories "réservées" aux hommes (éboueur, égoutier, voirie...) ; L'INSEE ajoute  : les femmes sont plus présentes dans les professions où les salaires sont plus faibles.
  • les hommes assument les métiers les plus difficiles, qui ne sont pas nécessairement les plus physiques ; il s'agit de métiers pénibles, rudes, salissants, dangereux, voire mortels : construction, voirie, égouts, garagiste, pêche en mer, extraction de minerais/pétrole/gaz, entretien de lignes à haute tension... Ces métiers, indispensables à la société, sont masculins, et à une écrasante majorité. Pourquoi cette discrimination ? Et pourquoi est-elle totalement ignorée dans les débats sur la parité ?
  • les hommes assument aussi des métiers à niveau de risque élevé : chirurgie, pilote de ligne ou de navire, pompier, sécurité... ;
  • quant à la sécurité du travail, l'INSEE relève que à durée d'exposition égale, les hommes ont deux fois plus d'accidents du travail que les femmes [4] ;
  • plus grave encore, l'Agence Nationale pour l'Amélioration des Conditions de Travail relève que les hommes sont 15 fois plus touchés que les femmes par les accidents mortels d’origine professionnelle : pour les hommes, le taux de mortalité pour 100.000 salariés s’établit à 6,0, pour les femmes, il est de 0,4 pour 100 000 [5]; 
  • selon l'observatoire des inégalités, en 2010, les hommes consacrent 47,8% de plus de temps professionnel que les femmes : 3h55 pour les hommes contre 2h39 pour les femmes, moyennes par jour, y compris samedi, dimanche et vacances) [6] ; ici, la persistance du maintien de l'homme dans un rôle de pourvoyeur est particulièrement flagrante ;
  • l'entreprenariat s'avère peu prisé par les femmes : en 2010, 28% des entreprises ont été créées par des femmes. Elles ont pourtant accès aux mêmes aides pour entreprendre. Mieux, elles ont accès à des aides financières réservées aux femmes tel que le FGIF, le CLEFE, le CDIFF, l'ARAF, Les Pionnières, Action'Elles... La requête "Aide aux femmes création entreprise" sur un moteur de recherche le démontre, qui retourne des dizaines de pages de réponses. A l'inverse, la requête "Aide aux hommes création entreprise" ne trouve aucune aide pour les hommes.
    Les aides aux femmes sont donc sans aucun équivalent pour les hommes. Et évidemment, ces aides leur sont statutairement inaccessibles, puisque la condition d'accès est d'être une femme. Parité ?
    Les femmes sont également 34,2% à être aidées par leur conjoint, contre 16,9% d'hommes aidés par leur conjointe. Enfin, elles y investissent moins d'argent que les hommes, ce qui est souvent un frein à la progression de l'entreprise [7]. Pourtant, s'il est un domaine égalitaire par excellence, c'est bien la création d'entreprise : partir d'une idée, y investir du temps, concevoir des produits ou services, développer une clientèle, administrer, développer... et tout ceci sans le "barrage fait par les hommes", si souvent invoqué pour expliquer les différences de salaire ou de carrière ;
  • la notion d'homme au foyer est quasi absente de la société : en 2004, 0,5% d'hommes au foyer contre 14,5% pour les femmes ou, autrement dit, 97% des personnes au foyer sont des femmes. Il convient donc de considérer cette très forte disparité, qui défavorise les hommes toujours autant emprisonnés dans leur rôle de pourvoyeur, et dans le principe que la place de l'homme est hors de la maison, et que son devoir est de tout faire, et tout supporter, pour y ramener son salaire ;
  • les congés parentaux sont un exemple caractéristique des disparités ; hommes et femmes y cotisent paritairement, mais les prestations ne sont absolument pas paritaires : 
    • ni en durée et montant : 11 à 18 jours calendaires pour les hommes, de 16 à 46 semaines calendaires pour les femmes, soit de 10 à 18 fois plus que pour les hommes ;
    • ni en proportion : 97% des congés parentaux sont aujourd'hui pris par les femmes déclare en 2013 la ministre des Droits des femmes [8] ;
  • enfin, ces contraintes pesant sur les hommes sont probablement un facteur contribuant à une cruelle disparité : la longévité moindre des hommes ; en 2010, 78,1 ans pour les hommes et 84,8 ans pour les femmes [9].
A la lecture de ces informations, le lecteur pourra s'interroger : les disparités sont elles fidèlement et objectivement présentées dans les médias ? La situation est-elle - globalement - à l'avantage des hommes, comme les médias en question semblent vouloir le laisser penser ?

Ces faits montrent en outre qu'il serait juste de rééquilibrer ce traditionnel débat de chiffres en y intégrant des aspects comme l'égalité face au choix socioprofessionnel, face à la répartition du temps famille-travail, face aux congés parentaux, face aux aides familiales, face aux aides à la création d'entreprise, face au passage à temps partiel, face à la durée de vie... aspects qui sont nettement à l'avantage des femmes.

Sources :
  1. INSEE - Taux de féminisation par secteur d'activité
  2. INSEE - Population active et taux d'activité selon le sexe et l'âge
  3. INSEE - Peu d'écart de salaire entre hommes et femmes
  4. INSEE - Les accidents du travail
  5. ANACT - Les salariés hommes principales victimes des accidents mortels
  6. Observatoire des inégalités - Durée moyenne des activités au cours d'une journée
  7. Ministère des Affaires sociales et de la santé- L'entreprenariat féminin
  8. Ministre des Droits des femmes - Congé parental
  9. INSEE - Espérance de vie 

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